Une étude révèle comment le gel d’un océan de magma boueux est peut-être le principal responsable de la composition de la croûte lunaire.
Chloé Michaut de l’École normale supérieure de Lyon et Jerome Neufeld, de l’Université Cambridge, proposent un nouveau modèle de cristallisation pour la composition de la croûte lunaire. Dans les grandes lignes, le modèle indique que les cristaux seraient restés en suspension dans le magma liquide pendant des centaines de millions d’années, alors que le « lunar slush » (qu’on pourrait traduire par « gadoue lunaire ») se figeait et se solidifiait. Les résultats ont été publiés dans la revue Geophysical Review Letters.
Voir aussi : La NASA nous offre un tour de la Lune en 4K
Un « océan boueux » de magma serait responsable de la formation de la croûte lunaire
L’hypothèse de l’impact géant suppose que la Lune se serait formée lorsque deux protoplanètes seraient entrées en collision, il y a plus de 4 milliards d’années (la Terre contre une autre, nommée Théia). La plus grande de ces deux protoplanètes serait devenue la Terre et la plus petite, la Lune. L’un des résultats de cette collision est que la Lune était très chaude, si chaude que tout son manteau était fait de magma en fusion.
Il y a 50 ans, les astronautes d’Apollo 11 ont collecté plusieurs échantillons provenant des hautes terres lunaires. Ces grandes régions pâles de la Lune, visibles à l’œil nu, sont constituées de roches relativement légères, formées par la cristallisation du magma, appelées anorthosites. Les anorthosites se sont formées au début de l’histoire de la Lune, il y a entre 4,3 et 4,5 milliards d’années.
En 2022, la manière dont notre satellite naturel a évolué thermiquement durant ses plus jeunes années reste encore en incertaine. À l’époque d’Apollo, on pensait que la croûte lunaire s’était formée grâce à des cristaux d’anorthite légers, « flottant » à la surface d’un océan de magma liquide, et avec des cristaux plus lourds, se solidifiant au fond de l’océan.
Voir aussi : La Lune a suffisamment d’oxygène à sa surface pour maintenir des milliards de personnes en vie pendant 100 000 ans
Aujourd’hui, de nombreuses météorites lunaires ont été analysées et la surface de la Lune a largement été étudiée. Les anorthosites lunaires semblent plus hétérogènes dans leur composition que les échantillons d’Apollo, ce qui contredirait ce scénario de « flottation » où l’océan liquide serait la source commune de toutes les anorthosites.
« Compte tenu de la gamme d’âges et de compositions des anorthosites sur la Lune et de ce que nous savons sur la façon dont les cristaux se déposent dans le magma en cours de solidification, la croûte lunaire doit s’être formée par un autre mécanisme », a déclaré le professeur Jerome Neufeld dans un rapport à l’Université de Cambridge.
Selon les deux scientifiques, la sédimentation du cristal est difficile à cause de la faible gravité lunaire et de l’agitation de l’océan magmatique en convection. L’équipe suggère que le refroidissement de l’océan de magma primitif a entraîné une convection si vigoureuse que les cristaux sont restés en suspension sous forme de boue, « un peu comme les cristaux dans une machine à neige fondue » estime le professeur Neufeld. Les résultats suggèrent que l’échelle de temps pour la formation de la croûte lunaire est de plusieurs centaines de millions d’années, ce qui correspond aux âges observés des anorthosites lunaires.
Source : Geophysical Research Letters