Alan Wake 2 arrive le 27 octobre 2023 sur Windows, PlayStation 5 et Xbox Series. J’ai eu l’occasion de l’essayer quelques jours sur PC avant sa sortie officielle. Afin de ne rien vous spoiler, voici mes impressions sur ce titre qui vaut vraiment le détour, à condition d’avoir une bonne configuration.
AVERTISSEMENT : Afin de ne pas vous gâcher le plaisir, ce test ne contient pas de spoilers et n’évoquera que les premiers instants du jeu, certaines mécaniques de gameplay, etc.
Je me souviens parfaitement bien de l’été 2012 où je plongeais, manette d’Xbox 360 en main, dans l’univers sombre et mystérieux d’Alan Wake. Sans être une énorme claque pour autant, j’ai souvenir d’un excellent titre qui avait su capturer mon imagination. Grâce à son mélange unique d’enquête et d’horreur déjà, mais aussi par son ambiance cinématographique, presque une première pour l’époque, et son intrigue bien ficelée autour de la petite ville de Bright Falls.
L’annonce d’Alan Wake 2 me sera presque passée à côté, mais c’est en voyant les premières images promotionnelles que j’ai immédiatement su qu’il fallait que j’y joue. Ça tombait plutôt bien : je venais juste de terminer Baldur’s Gate 3. Autant vous dire qu’Alan Wake 2 arrivait pile à temps pour noyer ma nostalgie : pas facile de passer à autre chose après avoir passé 120 heures incroyables en compagnie de mes vieux potes, Karlash, Ombrecoeur et Gayle.
Mais justement, il est de ces jeux qui vous happent dès les premières secondes, qui vous transportent dans un univers où le mystère et l’horreur se côtoient dans une danse macabre. Autant vous le dire tout de suite, Alan Wake 2 est l’un de ces jeux. Ayant eu le privilège d’y plonger, je vous donne mon ressenti sur les moments que j’ai passé sur ce titre que j’attendais avec impatience, sans aucuns spoilers.
Plongée immédiate dans les ombres
Le jeu commence par un prologue glauque à souhait qui plonge directement dans l’ambiance. Nuit tombée, vous incarnez un homme qui se réveille nu et frissonnant au bord d’un lac. Vous semblez être poursuivi par des hommes encagoulés, lampes torches à la main, mais visiblement, vous n’avez aucun souvenir.
L’impact de cette introduction demeure des plus saisissants — elle nous transporte brusquement dans un univers à l’atmosphère angoissante et mystérieuse qui rappellerait presque une intro d’une saison de The Sinner, jusqu’au moment où « l’homme nu » se fait brutalement assassiner.
Prologue terminé, on passe d’une intro façon The Sinner à l’ambiance d’un épisode de True Detective. Le jeu vous plonge dans la peau de Saga, une agente du FBI accompagnée de Casey, votre collègue flic très sympa incarné par l’incroyable acteur Sami Antero Järvi, le scénariste de Max Payne (qui lui aura aussi prêté son visage).
Au cœur de cette enquête sordide en pleine montagne, vous collectez des indices, posez des questions, cherchez à percer les mystères qui planent autour du meurtre de l’homme nu dont vous connaitrez bientôt le nom (mais chut, pas de spoilers). Il faudra aussi user quelques neurones pour comprendre certains petits détails et surtout, accéder à certains éléments (comme une cache de munitions, mais pas que).
Dans la peau d’une flic
Un élément qui a particulièrement retenu mon attention à cet instant est la mécanique d’enquête — lorsque Saga se trouve face à la scène de crime, il est possible d’analyser le corps de la victime, un aspect qui fait écho à certaines bonnes scènes de polars. Si l’ensemble est plutôt automatisé (cliquez sur ci, ça, le bras, le ventre, une tâche de sang, etc.), il n’en reste qu’on se laisse vite prendre par un agréable sentiment d’investigation policière.
L’une des nouveautés marquantes est l’antre mental, une phase de gameplay relativement innovante qui se déclenche en appuyant sur la touche Shift. Vous voilà soudainement transporté dans le bureau de Saga, face à un mur de détective garni de fiches qu’il faudra relier avec un peu de réflexion, muni de vos photos d’enquête. Il y a des dossiers à décortiquer, et du profilage à faire. Une immersion assez réussie pour les amateurs d’enquêtes qui apporte une dimension stratégique enrichissante.
Cet endroit n’est pas dénué de défaut en revanche, puisqu’au bout d’un moment, revenir dans cette antre en permanence a tendance à vite couper l’immersion et provoquer une certaine confusion entre l’endroit où vous êtes à un instant T et l’antre (croyez-moi, vous le ressentirez rapidement). D’autant plus que le gameplay ne s’arrête pas quand vous allez dans l’antre pour décortiquer vos dossiers, donc, évitez d’appuyer sur Shift en plein combat.
De True Detective à Twin Peaks…
Après avoir avancé dans l’enquête, Saga se rend avec son collègue dans la ville de Bright Falls, où Alan Wake a vécu ses premières aventures. L’ambiance évoque irrémédiablement Twin Peaks. Le Diner et son jukebox, les habitants étranges, et des secrets qui semblent enfouis à chaque regard en coin créent une expérience qui oscille entre le mystère et l’inquiétude. Et croyez-moi, Bright Falls n’est pas le seul endroit de ce genre, mais encore une fois, pas de spoilers.
Les animations faciales des personnages seront à mon sens le seul (tout petit) bémol qui aura un peu entaché l’immersion, lors des dialogues. Rien de bien grave, même si je les ai trouvées un peu à la traîne vis-à-vis d’autres grosses productions, comme TLOU 2, RDR 2, et d’autres. Mais en dehors des phases en forêt où on ne voit pas grand chose, Alan Wake 2 reste graphiquement splendide.
Si l’arrivée au sein de Bright Falls permet enfin de comprendre le potentiel graphique d’Alan Wake 2 (le Ray Reconstruction fait aussi son petit effet lorsqu’il est activé), c’est aussi le moment où on comprend que tout ça, on ne pourra en profiter que si sa carte graphique le permet.
… Mais une expérience qui ne se fera pas vraiment sans DLSS
Car il est crucial de comprendre qu’Alan Wake 2 nécessite une configuration solide. Avec une RTX 4070 (Founders Edition), un Ryzen 5 7600 et 32 Go de RAM DDR5, le jeu tournait plutôt bien : j’ai pu prétendre aux 60 FPS en 1440p, en activant le DLSS 3.5 sur Qualité, en poussant la plupart des paramètres graphiques au maximum, y compris le ray tracing sur élevé et le Ray Reconstruction actif. Mais c’est une grosse configuration en soi, et si les visuels sont agréables, sachez qu’une fois le DLSS enlevé, l’expérience s’avère très cahoteuse.
En voyant la configuration recommandée pour Alan Wake 2, qui exige une GeForce RTX 2060 ou Radeon RX 6600 pour jouer en Low, 1080p et 30 FPS, je me suis demandé comment les joueurs qui n’ont pas de cartes graphiques récentes pourraient bien profiter du jeu. Les studios ont-ils sacrifié leur art au profit de l’IA et du DLSS ? Ces technologies sont certes impressionnantes, mais ne risquent-elles pas de créer un fossé entre les joueurs qui peuvent les utiliser et ceux qui ne le peuvent pas ?
Un survival-horror avant tout
Bref — après une brève investigation et un détour par la morgue pour analyser le corps de « l’homme nu » du début — je ne ferais aucun spoiler sur ce qu’il se passe ici — le jeu bascule brusquement vers le survival-horror, signature du premier jeu.
Flingue à la main, le gameplay d’Alan Wake 2 reste fidèle à l’esprit du premier opus, tout en intégrant des éléments qui évoquent inévitablement l’ambiance de la série Resident Evil. Une continuité qui sera probablement rassurante pour certains.
Tout comme dans le premier Alan Wake, les combats contre les créatures humanoïdes sont tendus et impliquent une gestion relativement minutieuse des ressources. Les débutants seront en revanche ravis d’apprendre qu’il est possible de changer le mode de difficulté à la volée (ce qui m’est arrivé à plusieurs reprises, je dois l’avouer).
Si j’ai précédemment abordé la gestion un peu compliquée de « l’antre mental », il est impératif d’aborder un autre aspect du gameplay d’Alan Wake 2 qui mérite une certaine critique : son caractère labyrinthique. Je vous recommande fortement de rendre la touche de la carte facilement accessible, car non seulement les va-et-vient sont fréquents, mais il est également aisé de se perdre régulièrement dans cet enchevêtrement complexe.
Un tour de force en termes d’immersion narrative
Alors que le monde du jeu vidéo cherche à étendre les frontières de l’immersion narrative, Alan Wake 2 se démarque selon moi grâce à son habilité à mélanger scènes de jeu et séquences cinématographiques en direct, les fameuses FMV.
Tandis que les séquences de jeu « pur » vous engloutissent au cœur de l’action, les séquences en FMV donnent vie aux personnages par le biais d’acteurs en chair et en os. Toutefois, c’est véritablement la conjonction de ces deux modes narratifs, interactif et cinématographique, qui suscite une immersion que je qualifierais — presque — d’inégalée.
Encore une fois, je ne préfère pas vous spoiler ici, mais vous comprendrez vite par vous-même.
Si certaines de ces scènes mi-FMV, mi-jeu d’Alan Wake 2 m’auront profondément marqué, d’autres m’auront fait beaucoup rire, comme ces spots de pub qui passent à la TV. Et cerise sur le gâteau, les acteurs (Sam Lake, Matthew Porretta, Ilkka Villi, Anssi Määttä, etc.) sont tout bonnement irréprochables.
Un petit exemple, l’une des pubs TV :
Autre agréable surprise narrative, à mes yeux, réside dans les nombreux « flash cuts », rappelant le style d’Alfred Hitchcock dans Psychose. En plus de nombreux screamers, ces séquences, qui mettent en scène les visages d’Alan Wake et d’autres protagonistes pendant quelques secondes, sont particulièrement bien exécutées et apportent une touche d’effroi bienvenue. Elles enrichissent également la compréhension de l’intrigue, qui, on ne va pas se mentir, est un peu complexe.
Alan Wake 2, une plongée captivante dans les ténèbres
Encore une fois, afin de ne pas vous spoiler et de ne pas vous gâcher le plaisir de découvrir le jeu, je m’arrêterais ici. À mon sens, Alan Wake 2 est un jeu d’action-aventure captivant, qui réussi à mêler enquête policière, horreur et surnaturel avec brio. Le jeu alterne entre différentes phases de gameplay et d’ambiance, qui rappellent des séries comme The Sinner, True Detective et surtout, Twin Peaks.
Graphiquement splendide, il nécessite quand même une configuration récente pour tourner correctement. Le jeu propose malgré cela une histoire captivante d’une trentaine d’heures (38 heures dans mon cas), une belle suite réussie du premier opus qui ravira les fans de survival-horror.
Si vous êtes prêt à vous laisser happer par un tourbillon d’énigmes et de terreur, Alan Wake 2 est une expérience qui vous hantera bien au-delà de l’écran. Accrochez-vous, la spirale de l’obscurité est en marche — mais n’oubliez pas d’activer le DLSS…
- Narration léchée, digne d'une excellente série
- Atmosphère prenante, aux notes de The Sinner, True Detective ou Twin Peaks
- Graphiquement, c'est très joli
- Le prologue et les premières heures vont vous scotcher
- L'investigation, l'enquête, se sentir dans la peau d'une flic
- Gameplay tendu, proche d'un Resident Evil
- Les « flash cut » et certains spots TV avec de vrais acteurs qui participent bien à l'ambiance
- Le DLSS 3.5 fait des merveilles !
- Mais vous pouvez dire adieu aux 60 FPS sans le DLSS ou le FSR !
- Une configuration demandée beaucoup trop musclée sur PC
- En VF, des bugs de doublages où des lignes en VO viennent s'ajouter
- En VO, des sous-titres parfois en retard
- Beaucoup d'aller-retours
Après une attente qui s’est étirée sur une décennie, Alan Wake 2 se présente enfin, nous conviant dans son univers torturé, angoissant, et tout à la fois captivant. À mes yeux, cette suite parvient avec habileté à préserver l’essence même de son prédécesseur, tout en insufflant à l’ensemble une fraîcheur nouvelle, par le biais de concepts inédits, comme l’antre mental ou l’investigation. Le résultat est une expérience qui mérite incontestablement d’être explorée en profondeur. La narration, imprégnée d’ingéniosité, et les personnages, dûment façonnés, contribuent à forger cette atmosphère si singulière. Du point de vue du gameplay « brut », les connaisseurs de Resident Evil, du premier opus d’Alan Wake, et, plus généralement, des jeux de survie-horreur, trouveront une expérience des plus satisfaisantes. Bien que le titre demeure globalement exempt de bugs, les exigences matérielles pour sa version PC se montrent en revanche excessivement élevées. Les technologies NVIDIA, dont le DLSS 3.5, impressionnent, cependant, sans leur activation, maintenir une cadence de 60 FPS devient un véritable défi. Mais en cette fin d’année 2023, Alan Wake 2 sert de rappel, révélant combien les jeux vidéo peuvent se muer en un médium unique pour narrer des récits complexes, tout en évoquant avec force le souvenir d’une excellente série, où l’immersion et le suspense se rejoignent pour offrir une superbe expérience.