Le SAV de Tesla aurait des pratiques pour le moins douteuses. Une nouvelle enquête de Reuters révèle que l’entreprise d’Elon Musk rejette la faute de pannes concernant la direction et la transmission de ses voitures sur ses clients, alors même qu’elle sait que ses pièces sont défectueuses.
Après l’enquête sur le trucage de l’autonomie sur les tableaux de bord des Tesla, le constructeur automobile fait à nouveau l’objet d’une investigation explosive de Reuters. L’agence de presse britannique y décrit des pratiques d’entreprise ahurissantes. La firme texane aurait pour politique de rejeter la faute sur les propriétaires des véhicules en cas de défaillance de ses pièces mécaniques.
L’entreprise dirigée par Elon Musk ferait donc payer à ses clients des réparations pour des pannes causées par des pièces que l’entreprise considère en interne comme défectueuses. Ces pièces sont généralement liées à la suspension et à la direction des véhicules. En revanche devant les clients, le SAV de l’entreprise leur explique qu’ils se sont livrés à “des abus de conduite“.
Pour preuve, Reuters aurait consulté un document interne datant de 2019. Le constructeur y exhortait ses centres de service à rejeter les pannes sur une “mauvaise utilisation du véhicule“, comme “un choc avec un trottoir ou un autre impact violent excessif“. Légalement, les termes “abus” et “mauvaise utilisation” figurent dans les contrats de vente de Tesla. Leur mention explicite donne au constructeur automobile la possibilité de ne pas payer les réparations couvertes par la garantie, pour des incidents qu’il désigne comme tels.
Des témoignages accablants sur les pratiques du SAV de Tesla
Plusieurs propriétaires de Tesla témoignent dans ces pratiques. L’un d’entre eux était ainsi en possession de sa Tesla Model Y depuis moins de 24 heures lorsque la suspension s’est effondrée. Il s’attendait à ce que Tesla prenne en charge les réparations lorsqu’un représentant du service après-vente lui avait dit n’avoir trouvé “aucune preuve d’un quelconque dommage externe“, juste après examen. Une semaine plus tard, Tesla lui envoyait une lettre citant comme cause de la panne “un dommage antérieur influencé par l’extérieur sur la suspension avant droite”.
Il était pourtant le seul à avoir conduit la voiture et assure n’avoir subi aucun accident durant les 24 heures où il a pu utiliser sa voiture. Il a dû payer de sa poche 1 250 dollars pour la réparation, le reste étant couvert pas son assurance. Par ricochet, le prix de son assurance auto pour son autre véhicule a grimpé en flèche.
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De nombreux autres témoignages vont dans le même sens, rapportant des situations ubuesques où les propriétaires étaient contraints de payer des sommes allant jusqu’à 10 000 dollars pour des réparations que le constructeur ne prenait pas en charge. À chaque fois, elles concernent les même pièces aux taux de défaillance élevé, dont la direction de Tesla a connaissance. On ne s’étonnera guère qu’une étude montre que la Tesla Model 3 n’est pas fiable, avec un taux de défaillance élevé.
Tesla n’effectue de rappel que sous la pression des autorités
L’enquête documente également le manque de cohérence de Tesla quant aux rappels de pièces défectueuses dans les différentes régions. Par exemple, les ingénieurs de l’entreprise ont identifié qu’une pièce faisant partie de la suspension s’était rompue dans plusieurs incidents, quand bien même les conducteurs roulaient à faible vitesse.
Un ancien employé de Tesla “ayant une connaissance directe de la question” explique ainsi à Reuters qu’entre 2016 et 2020, l’entreprise a “résolu” environ 400 plaintes concernant cette pièce en Chine. Soit par des réparations dans le cadre de la garantie, soit par des “réparations de bonne volonté” si elles n’étaient pas couvertes.
Pendant quatre ans, le constructeur automobile a préféré procéder à des réparations au cas par cas, plutôt que de lancer un rappel des véhicules équipés de la pièce fautive. L’entreprise d’Elon Musk a bien dû s’y résoudre quand le gouvernement chinois a fait pression. L’administration compétente en Chine décrivait publiquement un “risque d’accident“, nécessitant un rappel immédiat.
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Pourtant, cette pièce était également présente dans les Tesla à travers le monde. Malgré des rapports concordants à travers toute la planète de défaillances, le constructeur n’a jamais procédé à un rappel de la pièce aux États-Unis et en Europe. Interrogé sur la question par le régulateur américain, le constructeur aurait affirmé tout comme à ses clients que les problèmes résultaient “d’abus du conducteur“.
La National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) amércaine, qui intimait récemment un rappel officiel de 2 millions de Tesla via une mise à jour logicielle à cause du pilote automatique, mène une enquête depuis 2020 sur une pièce de la transmission des Model S et X. Avec en plus cette enquête accablante de Reuters, le retour de bâton pourrait être sévère pour Elon Musk.
Source : Reuters