Google condamné à verser 500 000 dollars à un homme pour des résultats de recherche mensongers

Google a été condamné par un tribunal du Québec à verser 500 000 dollars à un homme qui avait vu apparaître un site qui l’accusait d’être un escroc et un pédophile dans les résultat du moteur de recherche. Après avoir tenté pendant 10 ans de faire retirer ce site de Google, il a porté plainte et gagné son procès.

Google Condamné

C’est l’histoire homme d’affaires Canadien, proéminent dans le secteur du courtage immobilier. Après avoir constaté que plusieurs clients refusaient de faire affaire avec lui, il décide de chercher son nom sur Google pour savoir si quelque chose les y avait dissuadés de traiter avec lui. En avril 2007, il découvre que le site web “RipoffReport” avait rédigé un article en avril 2006 qui le qualifiait faussement d’escroc et affirmait qu’il avait été “reconnu coupable d’attouchements sur mineurs en 1984“.

Google refuse de retirer l’article calomniateur

Le canadien demande alors au fondateur du site de retirer cet article, mais ce dernier refuse et exige que l’homme d’affaires prouve qu’il n’a jamais été accusé de ce crime, dans un retournement absurde de la charge de la preuve. L’homme a ensuite appris qu’il était trop tard pour intenter une action en justice afin de faire supprimer l’article de RipOffReport. Au Canada, “l’action en justice doit être intentée dans un délai d’un an à compter de sa parution, quel que soit le moment où la victime de la diffamation prend connaissance de la publication“.

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Devant l’impossibilité de faire retirer l’article en ligne, ce dernier s’est alors tourné vers Google pour demander au moteur de recherche de cacher le site calomniateur de ses résultats. Pendant des années, Google a fait un va-et-vient incohérent, acceptant parfois les demandes de suppression pour ensuite les refuser, car les liens ne cessaient de refaire surface.

Une bataille judiciaire avec Google

En 2022, l’homme se décide enfin à porter plainte contre Google. Le moteur de recherche a d’abord fait valoir qu’en vertu de l’article 230 de la loi des Etats-Unis sur les communications (le Communications Decency Act), la société n’était pas responsable du contenu de tiers et n’avait aucune obligation de supprimer les liens. Invoquant l’ALENA, l’accord de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, Google a laissé entendre que la loi québécoise obligeant les entreprises à supprimer les contenus illégaux dès qu’elles en ont connaissance ne pouvait pas s’appliquer, car elle est en contradiction avec l’article 230.

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Le juge en charge de l’affaire n’a pas adhéré à la logique de Google, mais n’a pas non plus prononcé des dommages-intérêts punitifs. En effet, Google avait refusé de supprimer les liens en croyant de bonne foi être autorisé à ignorer les demandes de l’homme. Dans sa décision, rendue publique le 28 mars, le juge écrit : “Google a ignoré le plaignant à de multiples reprises, lui a dit qu’il ne pouvait rien faire, lui a dit qu’il pouvait supprimer l’hyperlien sur la version canadienne de son moteur de recherche mais pas sur la version américaine, puis l’a laissé réapparaître sur la version canadienne après un arrêt rendu en 2011 par la Cour suprême du Canada dans une affaire sans rapport avec la publication d’hyperliens“. Le juge a ainsi condamné le moteur de recherche à lui verser 500 000 dollars et à retirer l’article de ses résultats.

Une question de droit très importante relative à Google

Bien que qu’il ait donné raison au plaignant, le juge a également déclaré qu’elle ne déclencherait probablement pas une série d’affaires similaires obligeant Google à supprimer des liens, comme il l’a écrit dans sa décision :

“Cette affaire soulève des questions sans précédent en droit québécois sur la responsabilité d’une société comme Google, qui fournit des services de moteur de recherche sur Internet, pour avoir diffusé aux utilisateurs de son moteur de recherche un message Internet diffamatoire, rédigé par un tiers et apparaissant sur le site d’un autre tiers, bien qu’elle ait été informée qu’elle facilitait l’accès à une activité illicite, à savoir un contenu diffamatoire. Toutefois, la conclusion de la Cour dans le présent arrêt, selon laquelle la responsabilité de Google est engagée, n’ouvre pas la voie à des actions en diffamation à son encontre ou à l’encontre d’autres intermédiaires de l’Internet.”

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Le juge ne veut pas créer un précédent judiciaire qui ouvrirait la boîte de Pandore, permettant aux gens de porter plainte contre Google dès lors qu’une information est fausse à leur sujet sur internet.

L’homme d’affaire blanchi par la justice face à Google

Au moins, cette affaire aura permis à cet homme de blanchir son nom des pages du moteur de recherche. Malheureusement, il aura vécu pendant 15 ans une épreuve terrible psychologiquement. Non seulement l’homme d’affaires a perdu des clients et des contrats potentiels, mais ses relations personnelles ont souffert des fausses allégations en ligne selon lesquelles il était pédophile : l’un de ses fils a dû prendre ses distances avec son père parce qu’il travaillait lui aussi dans l’immobilier.